La légicratie

Il y a la monarchie, l'impérialisme, le communisme, la dictature ... La démocratie semble être actuellement le mode de gouvernance le moins pire. Il serait pourtant tellement urgent de trouver autre chose. Ce que nous appellons à tort "démocratie" ne peut pas tenir indéfiniment, on voit bien que ça va s'effondrer un jour ou l'autre.

Il y a 3 raisons fondamentales à la base de son instabilité.

La nation est artificielle

En général les êtres humains tissent des liens en fonction de leurs affinités ou de leurs intérêts.

Qu'est-ce qu'un pays ? C'est une clôture fictive qui délimite arbitrairement un bout de terre. Les gens qui vivent à l'intérieur de cet enclos sont dans l'obligation d'être les meilleurs amis du monde même s'ils n'ont rien en commun. Leur consentement n'a aucune espèce d'importance.

Diverses stratégies sont mises en place pour les aider à réaliser l'impossible. Il y a par exemple des signes des ralliement et des mesures destinés à créer artificiellement une identité commune comme le nom du pays et de ses habitants, le drapeau, la devise, l'hymne national, la langue, le passé glorieux rempli de héros fictifs ou avérés ...

Le sport occupe une place démesurée dans les médias. En effet, c'est l'un des rares événements qui renforcent automatiquement l'unité nationale. La victoire permet de claironner : "Notre pays est le meilleur parce qu'il a baisé tous les autres, j'appartiens à ce pays donc je suis le meilleur". Cela génère un sentiment de fierté nationale, même si la fierté des uns est basée sur l'humiliation des autres.

La nation est démesurée

Il n'est pas toujours facile de s'occuper d'une famille. Il est difficile de gérer un village de quelques centaines d'habitants. Que dire des nations qui comptent plusieurs millions d'âmes ? C'est ingérable.

Il faut élaborer un ensemble de lois pour gérer le pays. Mais la population est tellement nombreuse que leur application nécessite des processus compliqués et l'embauche de fonctionnaires qui ne sont jamais assez nombreux. La complexité multiplie les confusions et entraîne l'opacité. Cela développe l'injustice et favorise la corruption. Le pays s'épuise donc à pondre une infinité de lois que les dirigeants sont les premiers à détourner à leur avantage. Les populations s'évertuent également à violer les lois à chaque fois que l'occasion se présente, pour améliorer leur train de vie.

Même avec les politiciens les plus honnêtes et les plus dévoués du monde, même avec les populations les plus conciliantes qui soient, il est impossible de faire fonctionner correctement une nation. Les habitants sont trop nombreux pour qu'il soit possible de concevoir des règles de fonctionnement équitables pour tous. Les lois qui avantagent certains groupes vont forcément pénaliser d'autres groupes. Chaque groupe tente donc d'infléchir la politique nationale pour favoriser ses propres intérêts, au détriment des autres groupes.

La nation est violente

Les divers groupes d'influence sont en conflit. Les habitants sont en colère contre leur classe politique. La méfiance soutend les rapports entre les habitants. La paranoïa s'insinue dans les rapports entre les administrés et l'administration. La tension règne donc dans les relations au quotidien.

Comme la cohabitation n'est pas aisée, il faut souvent recourir à la violence pour convaincre les récalcitrants qu'ils sont dans l'erreur, même si leurs doléances sont justifiées. Tout gouvernement possède un dispositif de répression qui fait régner la peur ou même la terreur. Dans les pays "gentils" on a peur du gendarme. Dans les pays "méchants" on a peur de la torture et des exécutions sommaires. La violence impose le respect des lois.

Que ce soit en sport ou dans tout autre domaine, les pays sont en compétitions les uns avec les autres. La tension internationale fait vivre toutes les populations dans la peur d'un conflit à l'echelle mondial.

Sommes-nous vraiment obligés de fonctionner avec de vastes pays artificiels ? Oui ! Car le moindre bout de terre libre est rapidement envahi par les conquérants (blancs) armés jusqu'aux dents. Les populations locales sont exterminées pour faire place nette avant de s'installer. Les envahisseurs se dépêchent alors de mettre en place la frontière, le nom, le drapeau, l'hymne, les lois ... pour éviter se de faire piquer le territoire par d'autres conquérants (blancs) plus lourdement armés encore.

D'habitude on considère que ce sont plutôt les criminels qui font usage de la violence. Comment se fait-il que les gouvernements y aient tout autant recours ? Quelle est la diffrence entre une mafia et un gouvernement ? Réponse : c'est la légalité.

La mafia délimite un territoire et soutire de l'argent aux habitants en leur promettant de les protéger. Le gouvernement fait pareil, ça s'appelle "impôts" et "taxes".

La mafia prélève une partie du bénéfice des commerçants en promettants de les faire prospérer. Le gouvernement fait pareil, ça s'appelle "cotisations"

La mafia mène un train de vie luxueux avec l'argent collecté. Le gouvernement fait pareil, ça s'appelle "frais de fonctionnement"

La mafia embauche des hommes de main pour accomplir les sales besognes, notamment punir les habitants désobéissants. Le gouvernement fait pareil, ça s'appelle "armée", "police", "gendarmerie" ...

La mafia fait tout pour engranger un maximum d'argent. Tout est bon à vendre, quitte à détruire le territoire et les habitants. Le gouvernement fait pareil, ça s'appelle "économie", "finance", "industrie" ...

La mafia fait la guerre ou conclut des alliances avec les autres groupes mafieux pour étendre son territoire, son influence ou ses activités. Le gouvernement fait pareil, ça s'appelle "géopolitique".

La mafia investit beaucoup dans la philantropie car aider les personnes défavorisées permet d'obtenir leur soutien et de limiter la contestation parmi les habitants. Le gouvernement fait pareil, ça s'appelle "mesures sociales".

La mafia s'adonne au mécénat car promotionner les artistes permet de paraître intelligent et raffiné, afin de masquer la violence ambiante. Le gouvernement fait pareil, ça s'appelle "haut patronage" ou "culture".

La mafia détourne les lois pour s'enrichir. Les politiciens font pareil mais comme ce sont eux aussi qui font les lois ils se débrouillent pour que leurs malversations soient légales, quitte à scandaliser le peuple.

Le gouvernement démocratique fonctionne exactement comme une mafia legale. Sans la légalité, les actions d'une organisation sont considérées comme étant mauvaises. Par contre, à partir du moment où on obtient le label "certifié légal" tout ce qu'on fait est bien. La violence, les malversations, les mensonges, les manipulations, le racket, la menace, le chantage, la corruption, l'injustice, les meurtres, les génocides ... tout est justifié car le respect de la légalité prime sur le respect de la vie.

C'est dans ce contexte plutôt glauque qu'on nous parle de "démocratie". Ce mot vient du Grec. "Demos" : peuple. "Kratos" : pouvoir. Le pouvoir au peuple. Quel pouvoir ?

Le peuple possède le droit de vote. C'est à dire que les habitants peuvent choisir le chef qui dirigera la mafia légale de leur territoire. Dans la mesure où la nation est trop vaste, le vote convient à une partie de la population tandis que l'autre partie se voit imposer un dirigeant dont elle ne veut absolument pas. Le vote engendre donc forcément des tensions et du mécontentement dans la population impuissante face au verdict des urnes.

Une fois que les élections sont terminées de quel pouvoir dispose la population ? Le pouvoir de se soumettre docilement aux lois, aussi injustes soient-elles. Le "pouvoir" de payer les taxes et impôts divers. Le "pouvoir" de voir sa vie brisée par l'implacable machine administrative lorsqu'on est dans un cas particulier qui ne rentre pas dans les cases. Le "pouvoir" de subir la répression en cas de contestation de la politique du pouvoir en place. Pouvoir ? Comment peut-on nous demander de croire que l'obéissance forcée est un pouvoir ?

En Latin "legis" signifie "loi". De là vient le mot "légal". Un système légal est donc un fonctionnement qui impose sa loi. La loi du plus fort. Le plus fort écrase le plus faible et tous les autres doivent se plier. Pourquoi ? Parce que c'est légal, c'est la loi, c'est la règle, c'est comme ça et c'est tout. La légalité remplace le bon sens. La légalité, c'est le mot magique qui rend l'oppression légitime. La légalité, c'est la javel qui rend les crimes propres.

Dans la mesure où la soi-disant "démocratie" consiste uniquement a obéir à des lois, on peut dire que nous vivons plutôt sous le régime de la légicratie. C'est la loi et non pas le peuple qui donne le pouvoir. La légalité se fabrique sur mesure. Les grands dictateurs africains ont bien compris le concept. Lorsqu'ils veulent faire quelque chose de répréhensible, ils modifient la loi, comme ça leurs actions deviennent automatiquement légales par un simple jeu d'écriture. Dans le pays occidentaux ce sont l'économie et la finance qui dictent les lois. Les gouvernements obéissent en échange de petits cadeaux confidentiels. C'est ça la magie de la légicratie.

Dans la légicratie, la loi est la colonne vertébrale à laquelle il faut adhérer, même contre son gré. Nous sommes contraints de nous soumettre aux lois, même lorsqu'elles entravent nos vies. Peut-être qu'un beau jour nous aurons la vraie démocratie. Le vrai peuple aura le vrai pouvoir de prendre sa vraie vie en charge de façon autonome et de fonctionner directement les uns avec les autres sans intermédiaire douteux.

Retour